Paradis de Dante Série 1, 1985 |
A propos de cette série
33 peintures sur papier, inspirées de La divine comédie de Dante.
L'impossibilité de peindre la transcendance du Paradis de Dante, conduit Micheline Lo à entreprendre d'abord la couleur sans les visages [série 1]. Ce qu'en dit Micheline LO
Bien sûr, le Paradis de Dante devait me tenter. L'enfer est immanent dans ses supplices; le Purgatoire est immanent dans sa modération; le Paradis par contre est transcendant.
Dante ne cesse de nous y emporter dans le rapt mystique. Cet au-delà des sens et de la raison reste cependant perçu, la transcendance se fait sensorielle grâce à l'évocation de la lumière sans cesse croissante, alors qu'elle est dès le début insoutenable. Grâce aussi à des vélocités extrêmes; Dante n'a pas quité un ciel qu'il se retrouve dans le suivant, envahi de la lumière accrue. De surcroît, cette extase globale est bousculée de militantisme théologique et de colères politiques documentées. En littérature, il était possible, l'écrit l'a prouvé, de suggérer cela par les mots, capables de porter la contradiction. La lumière, les couleurs et les traits de la peinture ne le peuvent pas, même avec Dante comme guide. C'est ainsi que j'ai procédé en cinq étapes [cinq séries], vaincue d'avance, mais sans doute séduite par l'impossibilité du projet. Défi visuel par excellence que la lumière au cours des trente-trois chants du Paradis. Dès le début elle est d'un éclat insoutenable, pourtant elle monte de chant en chant. Ce que les astuces du langage pouvaient apporter au poète faisait défaut au peintre. L'entreprise a été vécue comme une sorte d'effraction du crâne de l'auteur. Epouser son mystère sans le comprendre. Et voir. Même aventure pour la vitesse, qui chez Dante croît constamment. Une première série de 33 chants a entrepris la couleur sur papier et sans les visages, évoqués seulement par les initiales des prénoms : D pour Dante, B pour Béatrice. La deuxième série s'est risquée aux visages, mais à l'encre de Chine. La troisième a réuni sur toile visages et couleur. Ce qu'en dit Henri VAN LIER
Cependant, en guise de paysages cérébraux, Dante seul était allé là où personne n'était allé (L'acqua ch'io prendo già mai non si corse), et il décourage même qu'on le suive : « Vous qui vous tenez dans votre petite barque de la vie quotidienne (o voi che siete in piccioletta barca), suspendus à m'écouter (desiderosi d'ascoltar), retournez à vos rivages familiers (tornate a riveder li vostri liti), ne vous risquez pas dans l'océan (non vi mettete in pelago), car, si vous me perdez de vue (chè, forse, perdendo me), vous serez à jamais égarés (rimarreste smarrati) ». Bien plus, ce que Dante avait atteint, il ne pouvait le redire, parce qu'en ce cas, nous explique-t-il, l'intellect s'approfondit tellement que la mémoire ne peut le suivre (nostro intelletto si profunda tanto / che dietro la memoria non puo ire ».
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